Lettre d'Antoine à son épouse Magdeleine, 21 décembre 1807 ?
Expedié depuis : Lyon
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[...] Nous reçûmes un message d'Honoré étant à Machy, il eut l'attention de nous envoyer des nouvelles d'Azélie qui se porte bien et selon lui annonce une intelligence rare. Je suis persuadé que tu prévois que nous passerons les fêtes à Curis, il n'était pas dans mes intentions de les passer à Lyon ; je sais bien ce qu'il m'en coûte mais je suis bien persuadé qu'il importe de surmonter et que ce n'est qu'en faisant le plus tôt possible tout ce qui ajoute le plus à notre douleur qu'on parvient ensuite à la calmer en ne se privant pas par une marche contraire, des consolations qu'on ne peut trouver que dans les lieux et auprès de ceux qui furent si chers à ceux que nous ne pourrons plus retrouver que dans un monde meilleur. A cet égard nous sommes loin de penser et de sentir de même ; si j'étais riche et indépendant je n'en n'userais par sentiment et par goût que pour vivre constamment dans le local que tu redoutes tant ; crois-moi ma chère amie , ce n'est pas en courant, ce n'est pas en cherchant à vivre au jour le jour, qu'on peut maîtriser une aussi grande douleur ; c'est seulement dans l'accomplissement des devoirs qui restent à remplir qu'on peut trouver les moyens d'adoucir ce qui ne peut cesser qu'avec notre triste existence.
Quelque affreuse, quelque insupportable qu'elle soit nous ne pouvons en disposer, et la rendre encore utile est le seul moyen d'en diminuer les peines et d‘y trouver encore quelques charmes.
Mais ce que je t'écris, ma chère amie , comme tout ce que je t'ai répété si souvent est malheureusement sans effet ; tu te raidis contre tout ce qui est raisonnement et même contre tout ce qui tient à la tendresse de ceux qui t'étaient si chers, il semble que la partie aimante de ton être a perdu toute action, et comme j'aime à en douter encore, il faudrait comme je te l'ai souvent dit, qu'un de ceux qui te restent fût au moment de t'être enlevé pour que tu fus persuadée que tu pourrais être encore plus malheureuse et pour sentir la nécessité de la résignation.
Du courage ma tendre amie , songe que j'ai le plus grand besoin que tu en reprennes, le mien s'use et s'il me manquait tout-à-fait il ne resterait que le désespoir ; mais je t'afflige et j'ai d'autant plus de tort que je ne suis pas auprès de toi pour essuyer tes larmes.
Léo
ne m'a point
parlé du maître de danse, mais je crois qu'il lui ferait du bien et le lui donnerai
après ces fêtes. Il paraît que ses maîtresses sont contentes d'elle mais je ne les vois
pas, étant au palais quand elles viennent ; tu sens bien que je ne sais pas faire le
soutien de maman, rien ne peut remplacer une tendre mère, conserve-la donc à tes enfants
et que le coup terrible qui nous a frappés ne pèse que sur nous. Le pauvre Honoré
pense et écrit toujours de même, il
n'a cependant pour consolation qu'un
Je sens par moi-même combien tu éprouves de