Lettre d'Antoine à sa mère Antoinette, 8 novembre 1805

Expéditeur : Antoine Morand
Expedié depuis : Machi

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Archives municipales de Lyon, fonds Morand, FRAC069123_14II_35_2_1805_11_08_1.jpg
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Transcription

A Madame Morand Rue Brocherie à Grenoble.
Machi, le 8 novembre 1805

Avant-hier, chère maman, avant de partir de Lyon, j'ai eu le plaisir de recevoir de vos nouvelles, j'avais besoin de choses agréables car le départ d'Auguste m'a bien peiné et je vous assure que si comme j'aime à le croire, il n'y avait pas nécessité de le rappeler, on a bien inutilement fait du chagrin à cet aimable enfant qui avait eu tant de plaisir à recevoir la permission de rester à la noce de sa cousine .

Mon beau-frère devrait, pour nous faire oublier ce changement qu'il a apporté à nos plaisirs, quitter Grenoble quelques jours pour venir nous trouver dans ce moment intéressant. Je lui ai écrit pour l'y engager sans me flatter de l'obtenir, je le verrai arriver avec d'autant plus de satisfaction, que ce petit voyage me tranquilliserait un peu sur l'état de ma bonne sœur  ; car je fais ainsi que vous, tout ce que je peux pour m'abuser, mais après la manière obligeante et empressée dont Besson m'avait promis de venir à cette époque et le plaisir que cela paraissait lui faire, il faut bien que l'état de ma sœur soit empiré pour qu'il ne nous donne pas quelques jours.

Il vient d'envoyer à ma fille de la part de ma sœur une charmante petite cafetière d'argent, nous avons tous été très touchés de cette attention ; malgré l'usage, nous étions loin de croire que ma sœur et son mari puissent s'occuper de leur nièce dans des moments où ils auraient été bien excusables de ne penser qu'à des choses plus importantes ; Albine n'a pas voulu regarder ce qui était dans la boîte, sans avoir lu toute la lettre et toute femme qu'elle est ou sera bientôt je vous assure que le plaisir de recevoir une lettre affectueuse de son oncle l'occupait beaucoup plus que de l'idée de voir ce qu'il avait la bonté de lui envoyer ; elle est allée ce matin à Lyon pour parler de près à certain monsieur et se rendre digne par là des attentions rapprochées de son futur seigneur et Maître , elle revient demain, lundi l'acte civil et mardi la bénédiction etc… j'avais bien écrit à mon beau-frère que s'il ne venait pas j'allais vous presser de quitter ma sœur pendant quelques jours, mais je n'ai pas tardé à sentir combien il serait inconvenant et peut-être nuisible à votre santé de vous prier de faire un voyage aussi prompt ; ah j'aurais été trop heureux si j'avais pu réunir dans ce moment ma bonne mère , ma sœur , son mari et leurs enfants, sans cette affreuse maladie tout cela ce serait arrangé ainsi.

Comment se fait-il ma chère maman que je n'aie pas commencé par joindre tous mes remerciements à ceux de ma fille  ; cette pauvre enfant a été très sensible à tout ce qu'elle a reçu de beau, elle ne s'attendait à presque rien et en a eu toute la surprise ; on avait placé la bague dans l'écrin dont elle fait le plus bel ornement, elle est montée comme on le fait à présent et comme on le faisait anciennement, un très beau diamant dans le milieu et deux moins gros de chaque côté placés sur l'anneau de cette manière [ici, le dessin de la bague] qui est la plus nouvelle. Elle fait un très grand effet et j'ai entendu les connaisseurs l'évaluer douze cents livres ; vous ne pouviez choisir mieux pour diriger vos dons, mais c'est avec une bien grande peine que cette aimable femme s'est mêlée de cette affaire, elle espérait tant que ce qu'elle avait le plus désiré aurait lieu.

Je dois vous dire que ne connaissant point vos intentions, ce n'est qu'entre nous et d'abord à l'oreille que j'ai dit à Albine que ce superbe cadeau était de vous, vous me dites si vous en faites ou non un secret à Grenoble. Ma femme en est presque aussi reconnaissante que sa fille . Pour moi maman je vous avoue que je trouve que vous faites trop bien les choses et je vous gronderais si j'en avais la permission et surtout le courage. J'embrasse ma tante de tout mon cœur.

Je m'entendrai avec Mad. Raghon pour les paiements à faire. J'ai remis à M. Darvilliers l'argent que j'ai été recevoir chez M. Boncitat . J'ai tourmenté M. Tisseur mais il ne peut pas payer avant la fin de novembre veuillez bien ma chère maman ne tirer qu'à cette époque et me prévenir deux ou trois jours d'avance. [...]


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