Lettre d'Antoine à son épouse Magdeleine, 10 juin 1801

Expéditeur : Antoine Morand
Expedié depuis : Paris

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Transcription

Adresse ?
Paris, le 21 prairial an 9. Mercredi

En finissant ma lettre avant-hier ma chère amie , je n'espérais plus recevoir de tes nouvelles parce que je venais de recevoir une lettre de ma mère, mais on ne distribue pas sans doute tout un courrier à la fois car un autre facteur une heure après m'apporta une lettre de ma bonne amie et une de M. Gouret .

Tu sens que la première me fit d'autant plus de plaisir que je m'y attendais plus, cependant elle renfermait bien des choses qui ne me convenaient point. D'abord le départ de Mlle Joséphine ensuite celui du préfet et puis tout ce que tu as fait avec Girard , inutile.

Dans tout cela ma chère amie ce qui m'affecte le plus c'est l'éloignement de Mlle Joséphine, le dessin d'abord était bien agréable avec elle et avait bien son mérite pour une maman qui soigne l'éducation de sa fille mais à beaucoup d'autres égards les soins de son amitié étaient bien importants pour Albine non pas que sa bonne mère ne soit bien dans le cas de continuer avec succès tout ce qu'elle avait commencé mais parce que malheureusement à l'âge et du caractère de ta fille les observations et les instructions d'une personne étrangère font plus d'effet que celles d'une mère. Pour le dessin ma chère amie il faut voir M. de Sifrien , le consulter et l'intéresser un peu à ta fille pour que l'hiver prochain il veuille bien lui donner quelques conseils, je m'en suis toujours flatté et si Albine pouvait par sa raison, sa douceur des qualités essentielles plaire aussi à la dame cela pourrait être heureux quelque jour. Tu vois que je pense à l'avenir et adopte des idées que tu as eues la première. Au reste comme il est bien important qu'elle fasse des progrès et dessine beaucoup d'après la bosse, si M. Richaud paraît convenir à M. de Boissieu , il paraît avoir le ton fort honnête et comme à présent elle n'a pas besoin de leçons bien multipliées tu pourrais te décider à faire ces frais mais cela sera gênant pour la maman qui sera obligée d'assister aux leçons.

Quant au préfet le sort du paquet et les frais de son retour sont les plus grands inconvénients car je me flatte bien qu'il pourra me donner ici un avis favorable, je ne crois pas du tout aux contes que l'on fait et surtout au remplaçant dont on parle tu sens que je ne choisirais pas mieux si cela pouvait être et dépendre de ma volonté. J'imagine bien qu'en m'annonçant le départ positif du préfet tu n'auras pas la distraction de ne pas me donner son adresse tu me l'avais annoncée et je compte bien sur cette attention de ta part car sans cela je serai peut-être longtemps à le chercher. Ce provisoire obtenu je m'occuperai de mon retour car tu sens je l'espère aussi bien que moi qu'il est impossible de rester séparés plus longtemps. L'autre affaire présente chaque jour de nouvelles difficultés, je ne me les étais pas dissimulées. Mais je n'ai pu suivre une autre marche et je crains bien que dans le moment où on accorderait une continuation du double péage on ne peut pas obtenir l'exemption de la contribution même pendant vingt ans puisqu'on dira avec raison que c'est déjà à cause de tout ce que nous avons souffert par le siège que ce doublement est accordé ; c'est sur ce point de vue qu'il faudrait que l'exemption de la contribution fut déclarée en principe pour tous les ponts mais cela n'est pas aisé à faire décider et quand une personne est convertie il s'en trouve tant d'autres à convertir, qu'il faudrait trop de temps, d'argent et surtout plus de moyens que je n'en ai pour parvenir à faire tant de conversion. M. de Laurencin en réponse à ma dernière lettre approuve bien tout ce que je lui dis exceptée cependant ma résolution de ne pas revenir à Paris. Lorsqu'il faudra obtenir la loi et de charger de notre affaire les mêmes personnes qui agissent pour le pont de la Mulatière ce qu'il me dit à cet égard est une preuve de sa franchise et ne peut que m'être agréable, mais je t'avoue que je ne suis plus disposé à me rembarquer sur cette mer, elle n'est pas orageuse mais elle est si calme que l'on ne fait pas route et qu'il est cruel d'être si longtemps en danse loin de la terre désirée et habitée de tout ce qui nous est cher.

Pendant que j'en suis à M. de Laurencin je vais te copier mot à mot la dernière phrase de sa lettre sur un objet étranger à notre correspondance.

L'ancien curé de Chasselay me disait l'autre jour que Mde Morand ne paraissait pas autrement contente de Machy; s'il arrivait, ce que je ne présume pas, que vous eussiez jamais l'intention de vous en défaire, n'oubliez pas quelqu'un à qui la préférence est due et qui se trouverait avoir reçu 100 mille francs.

Je crois que c'est avoir payé qu'il voulait dire, à cet égard au reste il n'y a malheureusement pas d'équivoque.

Parle de ses petites graines, du chou que l'on pourrait planter pour les vaches et des « petits arbrissaux ». Evoque Tisseur et la douceur nécessaire pour parler à cet homme susceptible. Évoque le terrain de l'hôtel de vengeance qui appartient aux Bertrand et la nécessité que la compagnie n'y mette pas « un trop grand prix » ; pour les Bertrand mieux vaut recevoir des bons de la compagnie que d'en être dédommagé par le gouvernement ; proposera de faire évaluer le terrain par deux experts [...]

A reçu les quittances d'imposition que Magdeleine lui a envoyées et est fort déçu de Tisseur qui leur a fait payer à la Guillotière sans les en avertir.

[...] Il faut toute l'importance de l'objet qui occupe James en ce moment pour me consoler du temps qu'il perd ; ces voyages à la Croix-Rousse ne nuisent-ils pas à cette chienne d'entorse. S'il ne saute pas plus adroitement à l'avenir, je lui couperai les oreilles, cela ne l'empêchera ni de marcher ni de travailler. [...]


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