Lettre d'Antoine à son épouse Magdeleine, 31 mai 1801

Expéditeur : Antoine Morand
Expedié depuis : Paris

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Transcription

Sans adresse.
Paris, le 11 prairial an 9

Hier ma chère amie j'ai été pour voir M. de Rollin il était parti la veille, je ne conçois pas qu'il ne m'ait pas vu avant son départ ou ne m'ait pas fait dire qu'il partait ; au reste il ne faut point en témoigner d'humeur mais prendre les gens comme ils sont.

Aussitôt reçue ma lettre, comme il serait bien possible qu'il ne s'informât pas si tu es à Lyon, va chez Mad. Quevamont sœur de M. de Rollin et qui m'a fait honnêteté à Lyon, j'ai mangé chez elle ; Mad. de Rollin sera bien aise de faire ta connaissance, Mme Perrier sa mère est aussi du voyage, c'est une femme respectable et qui m'a témoigné de l'intérêt, tout cela passant à Lyon pour se rendre à Grenoble, je serais bien fâché que tu ne pusses pas les voir. Mais pour peu qu'ils fassent le séjour à Lyon j'espère que tu seras avertie à temps. Parle-leur de mes regrets de n'avoir pas eu le plaisir de les voir avant leur départ.

Mad. de Queramont loge au 3ème étage maison Tholosan quai Saint-Clair. Je ne crois pas que M. de Rollin cherche à voir des associés au pont, mais en lui parlant de mes affaires, si tu le vois, parle-lui de manière à ce qu'il ne parle point ni à Lyon ni à Grenoble de la seconde affaire, il est inutile d'en parler si elle ne doit pas réussir et dangereux de le faire dans le cas contraire.

Quant à celle de l'exemption des impositions, quoique je ne l'aie pas vu bien souvent à cause du peu d'intérêt qu'il mettait dans tout cela, soit dit entre nous il sait bien que j'ai été forcé de suivre cette marche et a bien vu que tout cela s'était prolongé bien malgré moi, je suis bien sûr qu'à cet égard il me rendra justice, quoique j'eusse souvent tout abandonné si j'avais cédé au découragement qu'il m'inspirait chaque visite que je lui faisais. Dieu veuille au reste qu'il ne finisse pas par avoir raison, il n'y a cependant rien de nouveau et comme je te l'ai dit tu sais que je suis pour huit jours.

J'ai été hier voir Bérenger il ne me reste que lui maintenant pour m'accompagner chez les ministres, mais c'est celui sur lequel je peux le plus compter.

Je ne peux pas répondre à ta dernière lettre, cependant il faut prendre le parti de répondre naturellement à mes lettres aussitôt reçues sans cela toute notre correspondance se trouverait un peu retardée parce que je vois qu'il y a de chaque côté une lettre qui arrive au moment où nous répondons à la précédente, il faut nous remettre au courant et je suis fâché de n'en pouvoir donner l'exemple aujourd'hui.

Je n'imagine pas que M. de Rollin voie le préfet , cependant parle-lui en et s'il le voyait prie-le de le remercier de l'intérêt qu'il a pris à notre affaire et qu'il tache de le prévenir sans que d'autres l'entendent, qu'il regarde comme impossible que la compagnie du pont se tire d'affaire sans une prolongation de péage et qu'il espère qu'il voudra bien nous aider à l'obtenir lorsqu'on lui demandera son avis sur cet objet.

S'il ne le voit pas, je l'aime tout autant, mais s'il a l'intention de le voir, il ne faudrait pas qu'il y allât sans lui parler de cet objet et témoigne l'intérêt qu'il y prend.

Je joins ici une petite lettre pour lui que tu cachetteras en faisant sécher le pain à cacheter avant qu'elle lui soit remise. S'il était parti tu écrirais chez Mad. de Queremont le reste de l'adresse et la ferait passer à Grenoble par la poste. Il est bien important que tu l'empêches de revenir sur l'idée de la prolongation car ilpossible qu'à Lyon il revint encore à son ancienne ; dis à Tisseur s'il le voit de ne pas lui cacher la très grande diminution qui en résulterait pour nous dans la recette.

D'ailleurs comme je le lui ai dit (à M. de Rollin ), mon intention est de rétablir la traille et de l'établir à deux liards au moment même de la prorogation, c'est une des choses qu'on pourra opposer avec succès aux réclamations des habitants des Brotteaux ; que je ferai valoir auprès du préfet lorsque je lui demanderai son avis ; qui d'ailleurs est nécessaire pour qu'on ne nous trouble pas dans la jouissance des trailles, le pont restant à un sou.

Je n'ai encore parlé de cette idée qu'à M. de Rollin , il la fort approuvée et j'espère qu'elle fermera la bouche à bien des gens si j'obtiens le reste ; je sais même qu'elle sera productive pour nous et que bien des gens qui passeront la taille ne seraient pas venus aux Brotteaux sans cette facilité et cette diminution dans le prix ; mais n'en parle pas encore, si ce n'est à M. de Rollin dans le cas où tu verrais qu'il reviendrait à craindre la prorogation du double péage.

Assure-toi de la remise de la lettre ci-jointe à Daudiffret , elle est de Mad. Le S qui le prie de donner de ses nouvelles, s'il ne veut pas achever sa malheureuse femme. Envoie Marie , maison Sain du côté de l'hôtel du nord au second étage ; elle ira de bonne heure remettre la lettre s'il y est, te la rapportera s'il n'y est pas et tu écrirais un mot pour le prier de passer chez toi lorsqu'il arrivera, dans le cas où il serait à passer ; alors tu me le manderais.

Je t'embrasse de tout mon cœur et ai écrit tout cela si à la hâte que tu auras bien de la peine à me déchiffrer ; excuse mon barbouillage. Adieu ma tendre amie , quand nous retrouverons nous donc ?


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