Lettre d'Antoine à son épouse Magdeleine, 25 avril 1801

Expéditeur : Antoine Morand
Expedié depuis : Paris

Facsimilés

Si le zoom ne fonctionne pas sur votre navigateur : cliquer sur l'image
Archives municipales de Lyon, fonds Morand, FRAC069123_14II_035_3_077_1.jpg
Archives municipales de Lyon, fonds Morand, FRAC069123_14II_035_3_077_2.jpg

Transcription

N°21/ Sans adresse
Paris le 5 floréal samedi

Sans nom sans adresse.

Hier ma bonne amie , j'ai reçu ta lettre qui m'annonçait ton retour à Lyon, je suis bien aise de t'y voir arrivée j'espère que cela facilitera notre correspondance car comme tu m'as gâté il m'en coûte de ne pas recevoir de tes nouvelles aussi souvent qu'à l'ordinaire.

J'ai été voir ce matin M. Mallein qui part pour Lyon demain matin avec son fils et M. Royer . Ils arriveront le cinquième jour qui sera si je ne me trompe jeudi, ils arriveront de bonne heure sans doute, ils comptent loger à l'hôtel du nord, si tu ne les vois pas le jeudi dans la soirée tu pourrais écrire à M. Mallein membre du corps législatif et l'engager à accepter ton dîner de veuve pour le lendemain avec son fils et M. Royer en lui disant que c'est le seul moyen de te procurer le plaisir de faire leur connaissance pendant le moment de leur séjour. Ils sont très pressés de se rendre à Grenoble mais si le défaut de places les oblige à séjourner un jour je serai bien aise que tu les reçoives et tous seuls, c'est le moyen de pouvoir causer un peu.

M. Mallein est un oncle à madame de Rollin , et paraît un digne homme, il est au corps législatif, il a son fils avec lui. Ils retournent à Grenoble, le frère de ce M. Mallein est l'ami et le voisin à la campagne de mon beau-frère , il a bien voulu se charger pour lui de graines et autres commissions qu'il m'avait données ; je l'ai fort peu vu, parce que cela ne me menait à rien, mais je lui ai fait des visites d'honnêteté et ai dîné avec lui chez Mme Perrier , la mère de Mme de Rollin .

M. Royer-Dupré qui voyage avec lui est le directeur général des contributions à Grenoble. Il paraît lié avec Besson  ; je l'ai rencontré il y a deux jours chez Béranger , il est malheureux pour moi de ne l'avoir pas connu plus tôt, mais très heureux cependant de l'avoir vu avant son départ. Il est très lié avec M. Hamet premier commis des finances de qui dépendra l'expédition de mon affaire. A la recommandation de M. Bérenger et à ce qu'il m'a paru aussi par attachement pour Lyon et considération pour ma famille, il a malgré toutes ses affaires employé des moments précieux à me rendre service et à me mettre dans le cas de pouvoir compter à présent sur la bonne volonté de M. Hennet à expédier le rapport et à le faire le moins défavorable possible, car je crains bien de ne pouvoir le persuader que je suis fondé quoique bien des gens cependant me paraissent convaincus. Sans lui j'aurais pu continuer à aller souvent dans les bureaux sans rien avancer, il est malheureux que je l'aie connu si tard mais encore une fois j'ai bien à me féliciter de l'avoir vu avant son départ ; je désire bien que tu puisses le recevoir et lui témoigner toute ma reconnaissance du service qu'il m'a rendu. Si étant à Lyon, il a occasion de donner de ses nouvelles à M. Hennet ou à son beau-frère M. Oyon , prie-le de dire un mot en ma faveur et de leur rappeler l'intérêt qu'il prend à ce qui me regarde et à toute ma famille. Tu sens que pour pouvoir lui faire cette prière, il faut avoir le temps de causer avec lui, et de le connaître un peu. Si Madame Dubois est à Lyon ou Madame de Montherot , tu pourrais ne pas les recevoir tous seuls, mais il ne faudrait pas avoir le moine par exemple, parce que M. Royer qui entend bien l'affaire parce qu'elle est de sa partie en causera sûrement avec lui et qu'il serait dangereux qu'il fût dans le cas de la discuter avec quelqu'un d'un parti contraire à nos intérêts. En voilà bien assez sur cet article ; tu vois qu'il faut rester chez toi jeudi après midi et si tu n'en as point de nouvelles sur les huit heures du soir envoyer un petit billet à l'hôtel du nord, l'adresser à M. Mallein . Mme M. J. espère que messieurs Mallein et monsieur Royer ont fait un heureux voyage et séjourneront demain à Lyon, elle les prie d'accepter pour demain son dîner de veuve ce sera le seul moyen de lui procurer le plaisir de faire leur connaissance… cela en tout autre chose que madame fera mieux que moi, ton domestique s'apercevrait de leur arrivée et laisserait le billet à l'hôtel s'ils étaient sortis, mais je pense que tout naturellement ils iront chez toi et comme on dit que ces voitures arrivent à midi j'imagine que tu les verras dans la soirée ; j'ai remis à M. Mallein un petit paquet de graines de choux avec un petit billet, le tout à ton adresse pour m'assurer qu'il ne passât pas sans te voir, il veut connaître mes enfants et en donner des nouvelles à leurs parents à Grenoble. Tu vois que dans tout cela c'est surtout M. Royer à qui je désire que tu puisses témoigner ma reconnaissance et demander comme de toi-même une recommandation, mais nouvelle par une lettre, je ne doute pas qu'il ne le fasse s'il te le promet, car je ne demande pas que ce soit une lettre qu'il me fasse passer mais seulement quelques p… en ma faveur dans une qu'il serait dans le cas d'écrire à M. Hennet ou à son beau-frère .

Le préfet a été consulté, j'ai vu la lettre qu'on lui a écrite, tout ce que tu auras fait auprès de lui sera arrivé fort à propos car il n'aura sûrement pas encore répondu, il est à désirer pour moi qu'il s'explique sur la question générale de manière à prouver qu'il ne regarde pas en effet que la loi sur les contributions renferme des dispositions qui soient applicables à un objet de la nature de la perception qui nous est concédée en remboursement de frais de construction ; qu'il croie donc que c'est bien le cas de soumettre cette question au conseil d'État… que quant à notre position particulière il n'a rien à ajouter à cet égard à son avis du 13 pluviôse dernier.

Comme je ne doute pas ma chère amie qu'il ne t'ait bien reçue et ne t'aie parlé de la lettre qu'on lui a écrite sur cet objet et que grâce à M. Royer [que] j'ai vu hier, tu verras si tu es dans le cas de le revoir pour tâcher de le mettre dans le cas de répondre dans le sens ci-dessus, tu pourrais le transcrire sur une petite note ou bien le mettre dans ta lettre pour dire au préfet que je désire bien qu'il réponde dans ce sens. J'espère d'ailleurs que tout naturellement ce doit être sa façon de penser, surtout s'il a pris la peine de lire mes observations ce dont tu auras jugé par ce qu'il t'aura dit, ce qui réglera ta conduite ; dans tous les cas préfère sa réponse si elle n'est pas faite, et si elle l'est, préviens-moi de ce que tu auras pu en savoir ; adieu ma tendre amie , j'ai bien besoin de te retrouver et je t'avoue que je suis souvent bien découragé ; après-demain je t'enverrai une note à communiquer aux intéressés des autres ponts ; j'embrasse nos enfants de tout mon cœur.

[...]


Licence

Creative Commons License