En attendant M. de Virieux , ma chère amie , j'écris un mot dans les bureaux parce que je vois qu'il ne me sera pas possible de rentrer d'assez bonne heure chez moi pour répondre à ta lettre d'hier, elle ne m'est parvenue que ce jour-là, dimanche, et j'avoue que sans être en peine à cause de ton séjour à Machy, je commençais à être triste de ne pas recevoir de tes nouvelles. Comme je craindrais que tu ne fusses en peine à ton tour je t'écris un mot. Ne te fâche pas de cette petite lettre ou plutôt de ce billet, demain je t'écrirai et ceci ne peut compter. Comme j'ai dans mon portefeuille le reçu de la parente de Divert , je te l'envoie ; j'ai bien tardé de porter cet argent parce qu'elle demeure bien loin de moi et que je ne l'ai trouvée que la seconde fois ; j'imagine que tu auras restée tranquillement à Machy pour finir toutes nos affaires, je voudrais de tout cœur ma bonne amie ne pas en avoir d'autres que celles-là, l'éducation de nos enfants et le plaisir de vivre l'un près de l'autre ; c'est à quoi se bornent tous mes vœux, il n'y a pas d'apparence qu'ils puissent se réaliser.

Tu as bien raison ma bonne amie de me parler de M. de Virieux , et de compter sur sa tête et son cœur, c'est toujours un excellent homme mais qui est maintenant très occupé et que je ne vois pas aussi souvent que je le voudrais. Bien des choses de ma part à tous nos amis ; ne m'oublie pas auprès de Mme Narbonne , j'écris à côté du défunt qui a bien envie maintenant de se rapprocher de la veuve et il paraît en effet qu'il le pourrait sans crainte ; je vais parler à M. de Virieux et donner ce billet à l'homme qui porte ses lettres à la Poste. Je t'embrasse de tout mon cœur, mille choses à nos enfants, qu'ils s'occupent ainsi que leur père à reconnaître autant qu'il est en eux tout ce que leur mère fait pour eux !

Le temps est maintenant très beau j'espère que le froid n'aura pas duré longtemps et n'aura pas nui à la vigne. Voilà du bien grand papier et une bien petite lettre.