Lettre d'Antoine à son épouse Magdeleine, 6 avril 1801

Expéditeur : Antoine Morand
Expedié depuis : Paris

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Transcription

Numérotée n°16 – adressée à Madame morand Jouffrey etc. à Lyon.
Paris le 16 germinal, lundi à midi

Encore une petite lettre, ma bien tendre amie , ce dont j'enrage car j'avais bien à causer avec toi et c'est une grande privation que de ne pouvoir babiller avec ma bonne amie  ; hier je rentrai de bonne heure dans l'intention de me livrer tranquillement à ce plaisir, mais je fus retenu chez Mme Safret , Mme de Fleurieu y vint et je ne quittai ces dames qu'à minuit pour venir me coucher ; ce matin je suis sorti de bonne heure et viens de rentrer pour écrire au préfet et t'adresser un mot. [...]

Le ministre a annoncé sa nomination par une lettre en date du 14.

[...] Je demande bien pardon à la minette de l'avoir grondée, en y réfléchissant, je ne sais pas trop pourquoi ce méchant minou avait eu cette fantaisie car enfin la vérité, c'est que quand il aurait su l'arrivée de l'autre, il n'aurait pas cru devoir pousser davantage la nomination parce qu'il ne pouvait pas imaginer qu'il fut encore question de le représenter après le refus dont on lui avait parlé. J'avais craint ensuite qu'en refaisant le travail on ne me déplaçât pour lui et voilà ce qui me donnait de l'humeur mais la minette ne devait pas en souffrir et minou a eu tort de s'en prendre à elle.

Elle part à Machy le lendemain.

[..] Si Mme Morand est encore à Lyon tu lui feras faire tous mes compliments et tu la préviendras que j'ai reçu hier pour elle de M. Faure 37 livres ; si elle est partie écris-lui de Machy, rappelle-moi à son souvenir et prie-lui de t'indiquer ou les moyens de lui faire passer cette somme, ou à qui tu peux la remettre à Lyon.

[...]

Mon œil va bien et ma santé est bonne, ma tête est toujours la partie faible et quand elle est isolée et séparée de sa meilleure moitié elle vaut encore moins qu'à l'ordinaire ; je me décourage facilement et suis bien triste quand je rencontre des obstacles mais ensuite je cherche à remonter sur ma bête et à vaincre s'il est possible.

C'est avec raison que je craignais le ministre des finances, la première conférence avec le chef du bureau qui est chargé de mon affaire m'avait tout-à-fait découragé et m'a bien peiné car si je ne réussis pas ce sera un chagrin pour moi, au reste on est bien heureux de ne pas en avoir de plus sérieux et de trouver dans des choses essentielles tant de motifs de consolation.

M. Guieu est arrivé, il est venu loger dans le même hôtel que moi, il me témoigne beaucoup d'intérêt, il est obligeant ; M. de Virieu et lui m'ont rendu un peu de courage, et je vais rentrer en lice à présent que j'en ai fait provision.

Je t'écrirai en détail sur ma position et la marche que je me décide à suivre, tu ne pourras pas rester à Machy plus de huit jours parce que je compte te charger de différents messages à Lyon, au reste j'ai tant à écrire et à travailler pendant quelques jours que je suis bien à plaindre à cause de mon inconcevable dose de paresse, que mes enfants ne s'y livrent jamais, il vient un âge où il est trop difficile de la surmonter.

Je t'embrasse de tout mon cœur ma bien bonne amie et vais porter ce billet à la grande poste parce qu'il serait trop tard pour la mettre dans la boite qui est dans cette rue. [...]

James va bien courir, qu'il prenne garde ainsi que ses sœurs au soleil il est bien dangereux dans ce moment, il ne touchera pas à mon fusil en mon absence, d'ailleurs il n'y a pas d'oiseaux à tuer dans ce moment.


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