Lettre d'Antoine à sa mère Antoinette, 1 avril 1801

Expéditeur : Antoine Morand
Expedié depuis : Paris

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Transcription

Non adressée
Paris, le 11 germinal [an 9]

Lettre non datée ; y est épinglée une lettre « copie » écrite par sa mère, datée du 23 germinal 1801.

Sa mère a été indisposée, lui souhaite bon rétablissement.

Évoque un monsieur Gadi qui va l'aider dans ses affaires auprès du ministre des finances.

[...] Cette lettre, ma chère maman , m'a fait le plus grand plaisir, j'y retrouve la tendresse de ma bonne mère et c'est pour moi un bien grande satisfaction, croyez que je ne peux vivre heureux lorsque je cesse d'y compter et que mon plus grand désir est toujours de la mériter et que rien n'en arrête l'expression ; être séparé de vous est pour moi un grand chagrin, mais si votre séjour dans une autre ville que celle que j'habite est nécessaire à votre tranquillité, s'il contribue à vous rendre moins malheureuse il faut bien que mon attachement pour vous me fasse prendre mon parti sur cet objet.

Tâchons au moins d'adoucir les peines de notre séparation par une correspondance amicale, passez-moi le mot car c'est surtout entre mère et enfants qu'on peut trouver la chose, surtout à l'âge où je suis parvenu ; j'ai éprouvé souvent que le défaut d'habitude de parler ou d'écrire franchement et sans crainte, à ceux dont on a dépendu longtemps pour en vouloir dépendre toujours par sentiment et par égards, fait que dans certaines occasions on se révolte au lieu de chercher à ramener par des représentations fondées, et en en appelant à leur tendresse ; en réponse l'autorité se fait sentir et des gens qui ne désirent réellement au fond que contribuer autant qu'il est en eux à leur bonheur mutuel, finissent par cesser de s'entendre et par se plaindre réciproquement. J'espère chère maman que tout cela n'arrivera plus entre nous, soyez bien persuadée que mon attachement pour vous a toujours été bien tendre, jugez-moi par mes actions et non pour des mouvements de vivacité qui tiennent à ma sensibilité même et excusables dans l'embarras de ma position, si elle était toute autre me viendrait-il dans la tête de vous demander des sacrifices en ma faveur, moi qui donnerais de grand cœur ma vie pour prolonger la vôtre ! c'est ma chère maman parce que j'espère vous conserver longtemps, c'est parce que je ne m'arrête jamais sur l'idée qu'il est possible que j'aie le malheur de vous survivre, que je souhaite que rien n'altère entre nous l'union qui peut seule adoucir nos peines et répandre quelques charmes sur notre existence.

L'article du journal qui vous a fait croire d'abord, ainsi qu'à plusieurs personnes qui m'en ont parlé ici, que mon affaire était terminée, concerne le petit pont construit sur la Saône à la place du pont volant, Nigret n'est pas le constructeur, mais l'un de ceux qui ont fait les fonds, cette affaire est excellente et la loi qu'ils viennent d'obtenir leur assure pendant cinquante-huit ans un péage qui ne leur avait été concédé que par un simple arrêté du département. Quant à moi je n'ai pas encore fait grand-chose et j'ai bien peur d'échouer auprès du ministre des finances, il ne faut pas cependant que le défaut d'espérance m'empêche d'agir, mais aller au contraire comme si on était sûr du succès ; M. Mayeuvre vient d'arriver à Paris, nous nous sommes déjà vus plusieurs fois, il me parle souvent de vous [...]


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