Lettre d'Antoinette à son fils Antoine, 25 décembre 1798

Expéditeur : Antoinette Morand
Expedié depuis : Grenoble

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Transcription

Au citoyen Morand Jouffrey, juge du tribunal de Lyon département du Rhône, à Lyon.
Grenoble, 5 nivôse an 7

Je ne voudrais pas, mon cher fils , vous faire des reproches lorsque je vous dois des remerciements. Mais pourquoi garder un silence absolu depuis le 28 brumaire qui m'occasionne les plus grandes inquiétudes sur votre santé. Avez-vous repris mal aux yeux ? ou des douleurs ? vous n'étiez point paresseux pour écrire. Le deviendriez-vous pour votre malheureuse mère ? qui toujours affligée par les souvenirs les plus déchirants, a besoin de s'entretenir avec vous pour adoucir la peine de notre séparation.

L'envoi que vous m'avez fait de mes trois petits enfants m'a fait un plaisir inexprimable, je les ai mis dans la partie la plus éclairée de ma chambre, je les regarde sans cesse je leur souris et leur parle comme s'ils devaient m'entendre, ils sont très bien dessinés, Albine a sa jolie tournure ses beaux cheveux assez de ressemblance, mais mon ami James est parlant, sa jolie figure est parfaitement bien rendue, la petite Eléonore, quoique très bien aussi, n'a pas autant l'expression de sa mine fine et lutine, c'est au moins ma manière de les voir.

Je vous avais fait des questions sur la traille, auxquelles vous n'avez pas voulu me répondre malgré la prière que je vous adressais pour me tranquilliser à cet égard. Ce que vous verrez dans la dernière lettre que je vous ai écrite si vous ne l'avez pas détruite.

Votre beau-frère ne craint point la manière d'aller à Lyon par des mandats d'arrêt comme la plus sûre. Il est toujours très extravagant, lui sa femmes ses enfants jouissent tous d'une bonne santé et vous font ainsi qu'à tous les vôtres les plus tendres compliments. Recevez ceux de votre tante , son estomac la tracasse un peu, elle prend de la rhubarbe avec de la magnésie, embrassez pour moi tous vos enfants grands et petits, et me croyez toujours votre bonne mère Levet Morand .

[...]

Je vous prie mon fils d'être exact à m'envoyer ce que vous me devez. J'ai emprunté d'un homme qui n'est point mon ami douze louis que j'ai promis de rendre exactement ; j'ai encore d'autres petites dettes de choses achetées pour mon ménage ; il me faut payer le loyer de mon appartement depuis la croix de septembre jusqu'à pâques, j'ai payé jusque ce terme ce que je devais sur le dernier argent que j'ai reçu. J'aurai besoin de la totalité de la somme comme vous le voyez car il est pénible d'être désargenté. Il fait depuis quelques jours un froid très rigoureux. L'Isère charrie, j'appréhende que le Rhône ne gèle ; donnez d'avance les ordres les plus rigoureux pour faire attacher de la manière la plus sûre tous les moulins et artifices qui sont au dessus du pont.


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