Lettre d'Antoinette à son fils Antoine, 14 juillet 1798

Expéditeur : Antoinette Morand
Expedié depuis : Grenoble

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Transcription

Au citoyen Morand Jouffrey juge du tribunal rue Saint-Dominique n°66 à Lyon
Grenoble le 14 juillet 1798

J'ai reçu, mon cher fils ... [...] des détails intéressants pour mon cœur sur tout ce qui m'est cher et dont la privation me coûte chaque jour des regrets. Pour les adoucir, je pense à toutes vos jouissances ; à celle d'être heureux mari, heureux père, vous joignez celle d'avoir un appartement dans un beau local, dont tous les agencements ont été faits par la main d'un grand maître , de posséder les objets les plus précieux, des livres, portefeuilles, et ce qui l'est bien davantage, tous les ouvrages de votre infortuné père . Lorsque seul et dans vos loisirs, vous les parcourrez, vous serez étonné que sa vie aie été assez longue pour tant de travaux. Si les soins que je me suis donné pour vous tout conserver, et vous le remettre dans le plus grand ordre ont été pénibles, ils ont été satisfaisants. J'ai terminé ma tâche en vous faisant dès à présent passer un dépôt précieux qui ne peut qu'ajouter à tout ce que vous devez à la mémoire du meilleur des pères . Lorsque vous songerez que comme je l'ai souvent dit, semblable au créateur de rien il a fait beaucoup. La jouissance d'aimables voisins vos amis est encore très agréable. Surtout celle de ma chère fille Demontherot , qui peut en tout servir de modèle et dont les filles seront d'aimables amies pour mes petites-filles, et serviront d'émules pour les mêmes talents qu'elles cultivent. Embrassez-les toutes pour moi bien tendrement, j'ai reçu une lettre de leur aimable maman . [...]

Je compte mon cher fils sur le soin que vous me promettez d'entretenir mes petits-enfants de leur malheureuse grand-mère . Je serai fâchée d'en être oubliée. Je ne crains point que dans un âge plus avancé vous leur disiez que mes justes regrets m'ont forcée de quitter et de fuir une cité infortunée qui entretenait chaque jour ma douleur et la renouvelait. Je pense que vous aurez soin de leur taire ce qui a pu ajouter à ma détermination, vous avez le bon esprit d'oublier vos torts à mon égard. Vous ne pouvez cependant vous les dissimuler et si vous ne m'aviez pas seulement donné la consolation d'en paraître fâché, vous n'aurez pas l'injustice de m'en imputer. Qui peut mieux que vous être persuadé que j'ai tout sacrifié à votre bonheur.  [...] Elle fait preuve de sa complaisance pour vous ; en tout vous êtes un coquin bien heureux. [...] mes amitiés à Marie, à Dodon et à ma pauvre Pierrette. Je la regrette chaque jour. J'ai cependant une assez bonne fille qui ne la vaut pas je pense pour la cuisine mais qui jusqu'à présent nous a donné bon le peu qu'elle nous a apprêté. [...]

Elle lui dit que son adresse est chez le citoyen dupuis saint vincent rue des près n° 163.


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