Lettre de Magdeleine à son époux Antoine, 14 février 1810

Expéditeur : Magdeleine Morand
Expedié depuis : Lyon

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Transcription

A Monsieur Morand de Jouffrey, rue de richelieu, hôtel ménars vis-à-vis la rue … à Paris.
Lyon, ce mardi matin, 14 février 1810.

J'ai aujourd'hui à répondre à deux lettres, mon bon ami , et te remercie bien de ton exactitude à me donner de tes nouvelles. Mme La petite vient d'envoyer pour en savoir, je lui en ai fait donner de bonnes quoique tu ne me parles pas de son mari dans la dernière ; enfin avec elle il est souvent question de l'article qui m'intéresse aussi beaucoup, celui de recevoir le remboursement de vos frais, elle dit que son mari est sûr de n'en être pas du sien, elle a l'air de plaisanter un peu la grande générosité du minou et dit qu'il sera bien le maître et que s'il s'y refuse le moine n'en fera pas autant ; je suis bien persuadée que tu n'as pas été dans le cas de parler de tout cela à M. Fay et par conséquent, de rien faire qui puisse l'engager à ne pas accepter, car ainsi que tu le vois, je ne doute pas que M. Sain ne vienne à bout de ce qu'il veut et qu'il prendrait lui tout seul plutôt que de manquer son but, je sais même gré à sa femme d'en parler autant et ce que l'un prendra les deux autres doivent bien sûrement en faire autant et un minou n'en doit pas faire les sacrifices et éviter les plaisanteries qui s'en suivraient, ainsi je suis bien tranquille à cet égard.

Mme de Gathelin est venue avec intérêt savoir de tes nouvelles lui loue beaucoup ton dévouement, j'ai bien parlé de la députation dont il fut, mais sans rien dire du résultat, l'objet me semble à peu près le même puisque ce fut aussi pour offrir le terrain de Perrache, et tu sais que la députation fut indemnisée, Mme Sain me l'assura encore dimanche.

M. Rigolet vient aussi souvent savoir de tes nouvelles, et tu sens qu'il est dans le cas de désirer ton retour qui lui sera oui ou non favorable.

M. Vitet vint bien samedi me faire part de tout ce que tu lui avais écrit, c'est quelque chose pour lui que de faire une visite, je lui en sus gré, il m'est (sic) beaucoup d'obligeance pour tout ce qui nous regarde et je ne doute pas de son attachement pour toi, je désirerais que tu pus lui être utile dans ce moment.

Je présume que tu dois entendre parler des changements futurs pour les tribunaux, et que nécessairement ainsi qu'ils ont été annoncés pour le commencement de l'année prochaine, j'aurais bien souhaité que ce voyage impromptu pour les affaires de James  ; mais tu n'en parais pas persuadé et je sens qu'il est bien important de profiter de cette refonte augmentation pour obtenir quelque chose de favorable à ton fils, qui je suis bien persuadée se fatiguerait beaucoup d'avoir longtemps à suivre l'état d'avocat ; ainsi pour une chose de cette importance, je sens que je sortirais un peu de mon apathie ordinaire, j'aurais un peu plus d'espérance du succès en raison de ce voyage qui je suis très persuadée peut faire beaucoup puisque tu ne négliges rien à cet égard, il est fâcheux ainsi que tu le dis de n'avoir rien à demander de positif au moment et je partage bien ton opinion à l'égard de tout autre état, nous avons même la satisfaction de penser que James ne désire pas autre chose que de se fixer d'une manière invariable près de nous ; sans trop se flatter nous ne pouvons pas douter tôt ou tard de lui procurer un état ici, de manière que notre ambition à cet égard sera satisfaite et il ne souhaite pas autre chose, cela convient à notre triste position, nous avons besoin d'être entourés de ceux qui nous restent, et du côté de l'intérêt nous ne pourrions pas faire de grand sacrifice ; je prise infiniment la connaissance de M. et Mme Guien , je ne doute pas même de l'empressement de Mme ; elle [manque le verbe] bonne et sensible et dis lui bien que malgré sa grande élévation je compterai sur ses bontés dans le cas où je ferais un voyage à Paris, tu as là une bonne occasion pour approcher le ministre de la justice et le motif de ton voyage ne peut partout que te faire honneur ; l'indisposition de M. de Montalivet arrive mal à propos, j'espère encore que tu pourras lui faire tes adieux ; je suis bien aise du retour de Mme Beugnot et que tu puisses la voir dans ce moment cela me fait présumer que peut-être son mari la rejoindra bientôt et si nous devions aller à Paris avec James il serait avantageux d'y trouver toutes les personnes qui pourraient nous être agréables et surtout utiles.

Il paraît que ce ménage des Fantin Désodoards est bien gêné, cela me fâche car nous ne pouvons pas oublier les obligations que nous leur avons, mais ils ont en même temps une excessive délicatesse, car tu te rappelles que nous n'avons jamais pu leur rien faire accepter, je suis étonnée que les Allier* aient éprouvé un changement défavorable dans leur fortune j'aurais cru le contraire (mais elle n'est pas toujours constante). Je serais contente que tu pus leur être utile pour une acquisition et si cela les mettait dans le cas de se rapprocher quelque fois de nous.

Les Fulchiron sont toujours bons et accueillants ; je compterais bien aussi sur eux, je présume que tu auras vu Mme Charton, ne reviens pas sans voir Mme Torrin, tu sais que le mari t'a donné un bon conseil, et je serai bien aise que tu pus donner de leurs nouvelles à Mme Mayeuvre * ; tu auras bien aussi pris quelques renseignements auprès de Mme Dherbouville pour ce que désire Mme Dujonchet , qui m'a parlé assez clairement de certain article dont nous ne pouvons que lui savoir gré, mais pour lequel nous avons heureusement bien du temps devant nous, je désire dans tous les cas que tu puisses l'obliger et pense aussi que tu ne quitteras pas Paris sans avoir vu son fils aîné.

Léo te recommande bien l'affaire de la tontine elle me charge de te dire qu'elle n'a que 20 livres à placer, je présume que tu apprendras qu'on peut trouver ici des correspondants avec ceux de Paris.

Je suis fâchée que tu ne te sois pas occupé de suite de ma commission importante, car il me semble que cela demandait un peu de temps, tu pouvais consulter la personne dont je t'ai envoyé l'adresse dans ma première lettre, qui est celle avec laquelle M. Merla a terminé de la manière la plus favorable ; Mme Fulchiron fera sûrement aussi tout ce qu'elle croira pouvoir convenir à cet objet.

Je suis décidée plus que jamais, mon bon ami, de tirer parti de cela en tâchant de le mettre en réserve et tu as la bonté d'y tenir pour le moins autant que moi ; mais nous avons le plus grand besoin de mettre infiniment d'ordre et d'exactitude à nos affaires particulières ; on ne peut avoir moins de goût de dépense que nous n'en avons ni l'un ni l'autre, tu y as plus de mérite que moi, nous tâchons et désirons aller tous deux au même but et il faut espérer qu'en y portant tous nos soins nous y arriverons, c'est celui d'abord de balancer nos charges, notre dépense, avec notre recette.

J'ai été bien reconnaissante de ce que tu avais consenti à me céder ce que je désirais, mais je n'en jouirai qu'autant que je penserai que le reste peut aller (et c'est ce que je croyais) cependant pour le moment nous sommes fort arriérés ; tu sais que beaucoup de gens se présentent j'ai continué de faire comme toi en les renvoyant à la fin du mois avec l'intention d'aviser à quelques petits moyens ; j'ai fait une note générale de tous les comptes que nous avons jusqu'à présent (celui de fory n'est pas reçu) ils se montent à plus de 3 M. livres. La dame qui s'intéresse si vivement à tes affaires est en avance de près de 2 M.. M. Tisseur de mille. Les filles n'ont que leur pension de payée et demande même sur le capital... 

deux longues pages sur les comptes ; (y revenir au besoin). Elle continue sur ce chapitre, pour clore :

c'est tout-à-fait un volume, mon cher ami, lis le tranquillement et sois surtout bien persuadé que dans tout ce que je pense et fais je n'ai pas d'autre désir que de t'éviter les petits ennuis de détails ou plutôt de t'aider à les supporter et de m'entendre avec toi pour le bien de tous en pensant que malgré notre douleur il faut prendre assez de force pour faire ce que nous devons aux autres ; si du reste tu trouves des inconvénients à mon esprit de calcul, tu me feras de vive voix les observations convenables et tu mettras de côté tout ce qui ne te conviendra pas, je ferai toujours en grand et en petit ce qui pourra t'être utile et agréable, tu sais qu'aucun plaisir ne peut me distraire, je ne trouve vraiment de distraction qu'à m'occuper de nos affaires ; cependant je te (sic) refuse d'aller à Machy, le temps est si mauvais pour moi et Léo car il me serait impossible d'y aller seule, si tu veux nous y irons ensemble, adieu je finis en t'embrassant de tout mon cœur ainsi que Léo .

Honoré est toujours à Curis, notre chère petite se porte et demande souvent le bon et papa, M. Navarre, Henry et Mlle Mariette s' hier avec nous. Je t'engage bien à brûler mes lettres et surtout celle-ci, fais de mon barbouillage tout ce qui te conviendra. Dis-moi quand il ne faudra plus t'écrire.


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